Souvent, les enfants qui s’opposent avec le plus de véhémence aux standards de la société veulent honorer leur vérité de toute leur âme. Qui a érigé toutes ces étiquettes que l’on colle de nos jours aux enfants : hyperactif, hypersensible, troubles de l’opposition? Et par rapport à quelles normes? À partir de quand commence-t-on à être « hyper » actif ou « hyper » sensible? Ce n’est pas parce qu’en tant qu’adultes nous nous sommes restreints dans notre expression, notre action, que la personne qui est à côté de nous et qui laisse la Vie circuler librement à travers elle et qui, oui, fait peut-être plus de vagues que nous, a un problème!
NOTRE PROPRE VÉRITÉ
Ma vérité, ta vérité, notre vérité…
Ce que Gregory Mutombo offre à chacun de nous, c’est une connexion d’âme à âme, sans masque, sans jugement, dans l’amour, le partage, le respect, la joie et la Lumière. Bref, ce que nous devrions tous nous offrir quotidiennement! J’ai discuté avec lui de la manière dont nous pouvons aujourd’hui honorer notre vérité. Ma vérité, ta vérité, notre vérité, est ce qu'il y a UNE grande vérité? Ou avons-nous chacune la nôtre?
Gregory, parlons un peu de ton parcours. Déjà, enfant, tu te questionnais sur notre raison d’être ici sur Terre, sur le sens de la vie elle-même. D’où te venait cette préoccupation?
C'est difficile de répondre en se replaçant en tant qu'enfant, mais ce qu'on observe chez plusieurs, c'est que très tôt l'enfant observe un décalage entre ce qu'il connait intuitivement, au fond de lui, et ce que ses parents lui disent ou ce que les professeurs racontent autour de lui. Il sent une espèce d'écartèlement. On lui dit « la vie c'est ça, il faut penser comme ça, il faut faire ceci, on n'a pas le droit de, on a le droit de, etc. ». Donc, cela pousse l'enfant vers une quête naturelle de vérité parce qu'il se dit « ce qu'on me dit ne résonne pas avec ce que je sais être vrai au fond de moi. » C'est ce qui initie la quête de vérité chez tout être humain.
Alors il peut s’installer une acceptation bien obéissante à ce que disent les parents, l'éducation, la société, et cela réduit cette quête de vérité. Mais si nous ne donnons pas ce pouvoir à autrui - parents, frères et soeurs, professeurs, médias - de déterminer pour nous ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas, cela laisse davantage de place à cet élan qui pourra nous permettre de nous rappeler ce qui est vrai pour nous. Ensuite, comme les enfants sont de parfaits enseignants, ils peuvent transmettre à ceux autour d’eux que la « vérité » en laquelle ils croient n’est pas forcément alignée sur celle qu’ils ressentent au fond d’eux-mêmes.
Mais toi tu as su résister à ce que les autres voulaient te faire croire comme vérité. Tu as eu un père assez rigide, assez imposant, et tu as préservé ta propre vérité. Mais plusieurs d’entre nous, pour être aimés, obéissants, nous nous sommes moulés à ce que les autres voulaient nous faire croire. Était-ce une force innée chez toi?
Je suis né en étant assez hermétique aux croyances des autres. Ce qui est assez singulier, c'est que je suis issu d'une famille qui, initialement, se montrait assez anticléricale : il ne fallait pas croire en Dieu ou à tout ce qui était contraire à la science. Pourtant, j'avais des certitudes inébranlables en ces domaines. Était-ce lié à la vérité ou à ma vérité, peu importe! Je portais des certitudes trop solides pour être soumises aux assauts des croyances extérieures.
Pourtant, effectivement, mon père n'était pas très conciliant. Il répétait jour après jour que la vie est un combat, qu’il faut se battre, qu’on n'a rien sans mal et ainsi de suite. Alors poliment, extérieurement, j’acquiesçais, mais au fond de moi je savais que ces idées n’émanaient que de son expérience, nécessairement partielle.
Chacun vient sur Terre doté d’une structure particulière, unique, une structure vibratoire qui est plus ou moins perméable aux influences extérieures. Ce n'est ni mieux ni moins bien en fonction des cas. Cela correspond à une suite « logique », à un apprentissage, à un type d’expérience, à une certaine « couleur » à porter. En ce qui me concerne, même si la pression extérieure était intense, que ce soit dans ma famille ou plus tard dans l’armée, je n’ai jamais accordé de crédit à ce qui m’était indiqué par cet entourage, du moins lorsque cela n’entrait pas en résonance avec mes évidences intérieures.
Même si on a jadis été perméable à toutes ces influences extérieures, peut-on ressentir à nouveau à ce qui vibre là, au fond de nous?
Oui car la bonne nouvelle, c’est que si on est capable de voir en soi cette perméabilité mentale, alors on peut prendre conscience du poids de toutes les influences extérieures qui ne sont pas notre vérité. On doit aussi comprendre que toutes ces influences extérieures ont aussi eu un but d’apprentissage pour soi : est-ce que ce que je prends systématiquement pour vrai ce que j’ingurgite, est-ce que telle idée résonne vraiment avec ma vérité? Que vais-je faire désormais de tout ce que j’ai pris pour vrai sans le faire passer à travers le tamis de ma conscience?
POUR ÊTRE AIMÉ JE SUIS PRÊT À…
Au départ, on adhère au conditionnement collectif parce qu’on a besoin d'être « aimé » par l'entourage, d’appartenir un minimum au groupe, au clan, on veut être en accord; c'est comme un contrat d’allégeance reposant sur une certaine loyauté inconsciente. Il n’est pas agréable d’entrer en opposition permanente avec son père ou sa mère. On a très souvent tendance à penser que l'unité passe par le fait d'être sur la même longueur d'ondes que les autres, même si c'est une longueur d'onde mentale réglée sur la peur du rejet et le jugement.
Paradoxalement, beaucoup croient que c'est en se niant partiellement qu’ils pourront se rapprocher des autres ou, du moins, ne pas trop s’isoler. Puis, on finit par découvrir que la véritable unité n’est pas fondée sur des accords de surface, sur des compromis ou sur une concordance intellectuelle, mais plutôt sur le fait d'honorer sa propre vérité, son unicité. Tant que l’on se contorsionne pour être prétendument plus proche affectivement ou socialement de l’autre, en réalité on s’en éloigne car on progresse sur un chemin de séparation d’avec sa propre vérité. Et se séparant de soi, en se coupant en deux par peur d’être seul ou trop différent, on ne peut évidemment être en unité avec quiconque.
Tu as fait beaucoup de recherches et d’études auprès de divers enseignants. Comment ces enseignements t’ont-ils influencé?
C’est au cours de mon adolescence que j’ai principalement lu des ouvrages portant sur les sujets dont nous parlons aujourd’hui. Je n’ai que très peu rencontré d’enseignants à proprement parler. Ces écrits venaient me dire : « Tu vois, ce que tu sens au fond de toi, il y en a d’autres avant qui l’ont dit; donc même si personne autour de toi n’en parle, ce que tu ressens n’est pas une vue du mental ni un fantasme, cela est, vraiment. » C’était pour moi bien davantage une forme de soulagement au milieu de ma solitude spirituelle qu’un apprentissage. Ce furent parfois des livres, des recueils, des écrits qui m’évoquèrent non pas la vérité - qui est absolument indicible - mais plutôt des directions la suggérant.
As-tu l'impression que certains adolescents qui se rebellent le font parfois pour affirmer leur vérité?
Beaucoup de parents m’ont amené leur adolescent en disant : « Mon enfant a un problème! Il se rebelle tout le temps. Il ne veut pas rentrer dans le moule, il ne veut pas faire d’études, etc. » Mais en fait, ce qui se passe à l’adolescence, c’est que l’âge du cœur amène la conscience incarnée dans le corps à prendre son pouvoir. À cet âge, on est comme aspiré vers cette verticalité irrépressible. C'est donc un temps fondateur dans l'existence.
À l’adolescence, certains vont abdiquer face à eux-mêmes pour entrer résolument ou par dépit dans un carcan familial ou social. Ils vont suivre les études qui plaisent à leurs parents et entrer dans cette fameuse case qui va les rassurer pour l’avenir. Mais il y en a d’autres qui vont refuser et dire « Non! Moi je ne peux pas! ». Ce qui est difficile pour eux, c’est que bien souvent ils ne savent pas encore ce qu’ils veulent « faire » à la place de ce qui leur est demandé. Ils ne savent pas encore quel est ce grand « Oui! » qui va remplacer le « Non! » qui les oppose en permanence à leurs parents.
Les parents doivent comprendre que les enfants ne se rebellent pas contre eux, mais contre un système de croyances qu’ils savent erroné au fond d’eux-mêmes. Les parents ne peuvent pas leur transférer leur expérience, bien que beaucoup s’y acharnent. En outre, ils ne connaissent pas la Vie qui va se dérouler dans le futur pour leurs enfants. Alors cela demande aux parents de faire confiance à ces âmes incarnées dans ces corps d’adolescents et d’honorer ce mouvement nécessairement neuf et inconnu de la Vie.
PARENTS ET ENFANTS : QUI ÉLÈVE QUI?
L’adulte manifeste cette incroyable capacité de se nier, de se conformer, de se rapetisser dans sa vibration pour correspondre aux normes de sa société. Qui a décidé que nous devions nous comporter de telle manière dans telle circonstance? La Vie est neuve à chaque instant! J’aime beaucoup parler d’unicité. L’unité n’est collectivement réalisable sur ce plan terrestre que lorsque chacun se reconnait dans son unicité. Dès lors qu’un parent souhaite qu’un enfant lui ressemble, il nie cette unicité; il choisit la voie de la dualité, celle qui le sépare de l’unicité de son enfant. Il ne reconnait pas à cette âme nouvelle le mandat de venir amener une vibration neuve. Dès qu’un parent dit à son enfant « Je sais ce qui est bon pour toi », il rompt le contrat d’élévation mutuelle existant entre eux. Les parents élèvent peut-être leurs enfants, mais les enfants élèvent aussi leurs parents. C’est ce qui devrait nous guider dans nos rapports avec nos enfants : respecter leur vérité en incarnant la nôtre.
Il y a un changement majeur de conscience à opérer, un mouvement individuel où chacun doit prendre le temps de s’interroger : en ce moment, suis-je en train d’honorer ma vérité, d’honorer ce pourquoi j’ai pris forme humaine en cette planète? Bien sûr, on peut répondre assez spontanément par l’affirmative en s’appuyant sur des critères formels tels que « j’ai un travail correct, un salaire confortable, une jolie maison, etc. ». Mais au-delà de cela, est-ce que, en ce moment, en mon âme et conscience, je suis en train d’accomplir ce pourquoi je suis présent ici?
Si chacun abandonnait sa course effrénée et prenait le temps de découvrir sa propre vérité, si chacun prenait cette responsabilité d’assumer qui il est, et non de combler le désir de ses ancêtres ou le rêve de quelqu’un d’autre, la face du monde s’en trouverait immédiatement changée. Cette reconnaissance de sa propre unicité est fondamentale dans le processus d’incarnation de sa vérité. La société ne change véritablement que lorsque son contenu - c’est-à-dire les êtres humains qui la composent - s’éveillent à eux-mêmes.
Je sais que tu préfères ne pas parler de mission, de rôle, d’éveilleur de conscience, ni d’enseignant, alors comment définirais-tu la nature de ce que tu accomplis ici en suivant ta vérité?
Je n’ai pas la prétention d’éveiller qui que ce soit. Je ne fais que partager ce qui m'anime, ce que je suis ici et maintenant. Je ne prétends à aucun titre. Si ceux qui se sentent appelés à recevoir ce qui me traverse, que ce soit dans le cadre de conférences, de stages, de séminaires, de livres ou de films, retrouvent par ce biais le chemin qui les mène à leur vérité, alors j'en suis profondément heureux. Mais je ne me donne pas de fonction particulière, de titre ronflant qui serait forcément erroné par rapport à ce que c’est. Avant d’être une action, c’est d’abord une vibration. Elle sous-tend un état qui peut se décliner en une multitude de formes. Et les plus puissantes sont invisibles aux yeux de la chair.
Tout être humain est amené, tôt ou tard, à servir de point d’ancrage ou de repère pour un ou plusieurs autres. Il est question ici de vibrer sa nature originelle avec le moins de voiles possibles, avec le moins de fard possible. Ce n’est que de l’amour. Que cet amour apparaisse en tant qu’oeuvre d'art ou composition musicale; que ce soit par le biais de soins apportés à une personne âgée ou à un enfant; que ce soit sous la forme de confection de vêtements ou de nourriture, cela est en vérité identique. Aider l’autre, c'est simplement lui rappeler l'amour qu'il est et n’a jamais cessé d’être.
L’AMOUR N’ATTEND RIEN EN RETOUR
On peut rappeler à l'autre l'amour qu'il est par une multitude de vecteurs différents mais si, au départ, on n'est pas soi-même mu par cet Amour originel et que l’on cherche encore à être reconnu par l'autre, à le sauver, à le convaincre, à juger ce qu’il vit ou à vouloir le changer, eh bien toute entreprise est vaine. L'Amour n’attend rien. Il ne se donne pas, il se partage. C’est une proposition qui n'a pas de but en elle-même. Alors peu importe la forme que cela prend, c'est un détail.
Depuis ton jeune âge tu cherches à voir « au-delà du voile ». Comment as-tu su qu’il y avait ce voile et pourquoi chercher à voir au-delà des apparences?
Beaucoup d’êtres sur Terre ont cette même capacité au fond d’eux-mêmes, on ne peut pas se mentir indéfiniment. Si quelque chose est erroné, ou voilé par l’ignorance, au fond de soi on le sait. Il y a une forme de sagesse innée, de force innée en soi qui permet de contempler l’existence au-delà du voile. Ce qui signifie que même si on a devant soi un voile épais, il y a en soi suffisamment de perspicacité, de conscience pour traverser ce voile et voir ce qui « se dissimule » derrière.
Pour ma part, comme je l’ai écrit dans mon premier livre, j’ai conservé le souvenir de mon entrée dans l’utérus de ma mère et de mes temps d’accoutumance à la densité du fœtus qui m’y attendait. Je savais déjà que je n’étais pas uniquement ce futur corps et que ce qui m'animait était nécessairement plus vaste que ce futur nourrisson. Assurément, cela m’a été utile pour ne pas me laisser prendre au jeu des apparences ainsi que l’illusion générale y invite.
Mais il n'y a pas un parcours qui soit plus simple ou plus aisé qu’un autre. Certains disent que j’ai de la chance de pouvoir voir derrière ce voile, mais ils oublient que je vois aussi derrière d’autres voiles, pas seulement ceux qui nous arrangent, pas seulement ceux qui sont entre l’humain et les Cieux… Il y a des voiles dans toutes les directions, dans toutes les dimensions. Voir, c’est accepter de prendre en considération tout ce qui existe dans toutes les formes d’expression, des plus subtiles aux plus denses. Il existe des gammes de fréquences où la lumière est une idée qui a été oubliée.
Ce désir de tout voir t’a amené à t’engager dans l'armée où tu es resté pendant 18 ans où tu as vu autant d'horreur que d’entraide. Quelle était ta motivation profonde à t’engager?
Au début, lorsque j’ai reçu cette injonction profonde à l’intérieur de moi d’entrer dans l'armée, je n’ai pas du tout su la « cause » qui me faisait y obéir. C’est seulement une fois en son sein et après avoir accepté de me laisser imprégner de la bonne volonté de voir derrière le voile que j’ai commencé à en appréhender la finalité. On m’a souvent demandé comment j’avais réussi à tenir aussi longtemps dans un univers aussi dur, aussi hostile et confrontant. Mais c’est là tout le « sens » de cet itinéraire. C'est tellement facile de voir l'amour dans le regard d'un nourrisson, dans le vol d'un papillon ou dans un rayon de soleil qui nous caresse la joue… Mais cet amour que nous manifestons aisément lorsque le voile est très fin, est-ce que nous pouvons aussi l’incarner lorsque le voile est soudainement très épais et ne laisse quasiment plus passer la lumière?
L’AMOUR PEUT-IL TRAVERSER TOUS LES VOILES?
Lorsqu’entre moi et l’autre s’interpose un fusil d’assaut, une haine féroce, est-ce que l’amour que nous sommes demeure capable de traverser ce voile pour aller le rencontrer? Bien des couches et des couches sont à dissoudre - apparence physique, attitude, religion, idées - avant que de commencer à entrevoir l’autre dans ce qu’il est vraiment. Tant d’ignorance peut nous priver de la contemplation de ce noyau précieux, présent en chacun. Encore une fois, il n’y a guère de transcendance à aimer ce qui est naturellement aimable, doux et docile. Par aimer, je n’entends pas ici une validation intellectuelle ou morale de l’autre et de ses actes, mais une absence de jugement à son encontre.
Tant que l’on continue de croire en une réelle séparation entre l’autre et soi, on ne peut pas aller au-delà du voile pour voir l’autre dans sa vérité. Je ne cache pas qu’en maintes circonstances j’ai été tenté - et j’ai même trébuché parfois - par l’idée que l’autre était vraiment contre moi, et que le problème venait de l’extérieur. Mais le problème n’est jamais là, devant. Le problème est en nous et persiste tant que nous ne sommes pas capables de laisser, en nous, l’amour s’étendre pour dissoudre toute trace de jugement et aller rencontrer l’autre dans sa vérité éternelle.
Alors existe-t-il un environnement plus propice à ce dévoilement que celui qui semble en être le plus éloigné, tel celui des conflits les plus cruels? À chacun d’être honnête dans son intégration du concept d’amour inconditionnel… Dans maintes circonstances, j’ai pu mesurer le pouvoir de l’Amour, en termes de « contagion ». Dans tant de situations d’hostilité manifeste, lorsque j’ai cessé de voir l’autre comme un « ennemi », quand j’ai bien voulu le reconnaitre comme mon frère, cette distance entre nous a disparu. Perdant sa raison d’être, l’ancien scénario pouvait en laisser un nouveau se dessiner.
J’ai réalisé, par l’expérience, que notre seul pouvoir en ce monde passe par le fait d’incarner l’Amour que nous sommes. Vouloir ou espérer un changement sans en être soi-même la manifestation vivante revient à hurler pour obtenir le silence… Ce n’est pas en combattant, en polémiquant, en résistant ni en dénonçant quoi que ce soit avec des banderoles que la paix s’obtient. Toutes ces gesticulations ne font que maintenir et cristalliser ce contre quoi on s'imagine lutter. La seule évolution possible en ce monde est engendrée par l’amour qu’on veut bien laisser grandir en soi. Il est donc nécessaire que notre corps soit chaque jour davantage imprégné de cet amour et que cet état transparaisse dans chacune de nos actions.
Il ne s’agit pas « d’envoyer » de l’amour. L’Amour ne s’envoie pas. L’Amour est, tout simplement. Il s’agit d’incarner cet Amour, autrement dit, il est nécessaire que notre corps et l’instinct de survie qui le caractérise ne constituent plus une sorte de frein à l’expression la plus ample qui soit de l’état d’unité. Il n’y a pas d’autre but sur Terre que d’aimer et d’être aimé. Non pas être aimé pour combler des carences, des manques ou des blessures affectives, mais pour ce que l’on est et pour sentir ce huit infini, cette respiration entre soi et le monde, de plus en plus puissante. Il n’y a rien d’autre que cela.
Certes, pour beaucoup, le but est d’être aimé et reconnu par les autres, les parents, la société, le conjoint, etc. Ils s’efforcent dès lors de tenter de correspondre aux désirs d’autrui pour enfin être « aimés ». Mais on peut voir à quel point cette voie est sans issue puisque rien ne se comble jamais. Elle conduit juste à l’impression de donner abondamment et de ne jamais recevoir ce que l’on s’estime en droit d’attendre. Évidemment, puisque ce que l’on « donne » est teinté d’une carence… On ne peut véritablement aimer quelqu’un que lorsque l’on cesse d’avoir besoin de lui.
Oubliant notre propre vérité, oubliant qui on est au fond de soi-même, on part à la recherche de cette existence dans le regard de l’autre. Mais cela ne fonctionne jamais puisqu’il faut reconnaitre et accueillir cette vérité en soi d’abord et avant tout. Notre but est d’aimer à l’infini et c’est évidemment tout un programme, car nous sommes tentés à chaque instant de haïr et juger ce « chaos » que l’on déplore en nous et autour de nous. Mais nous avons choisi de nous incarner ici pour nous rappeler que nous sommes l’Amour, pour apprendre à aimer; aimer même cet apparent désordre, cette densité en nous et autour de nous.
L’OBSTACLE EST TOUJOURS INTÉRIEUR
Quand nous disons que nous n’aimons pas une personne ou une situation, ce n’est pas l’autre ou la situation que nous n’aimons pas, c’est ce que nous ressentons quand nous les regardons. Nous n’aimons pas sentir en nous l’absence d’amour que nous projetons sur eux, nous n’aimons pas sentir l’oubli de notre véritable nature aimante. Ce n’est jamais l’autre que nous n’aimons pas, ce n’est pas le décor non plus. Ce que nous n’aimons pas, c’est de ne pas sentir en nous l’amour à chaque instant. C’est notre plus grand défi. Et il est nécessaire d’accepter, ici et maintenant, de ne pas toujours y parvenir. C’est fondamental!
Beaucoup de personnes se croient « dans l’amour » et essaient de se convaincre que c’est réel. Mais le corps, lui, ne ment pas et derrière, dans le ventre, cela se tord dès qu’une circonstance particulière se présente. Et malgré tout, la tête continue de se répéter, comme un mantra, « je suis l’amour, je suis l’amour », niant ainsi la partie humaine ancestrale qui ne sentant pas du tout cet amour dont il est question et se juge d’être encore là.
L’obstacle est intérieur. Il est dans le refus de sentir tout ce qui, en soi, raconte une autre histoire que celle de l’amour inconditionnel. L’incarnation sert à cela. On vient dans un corps, legs de générations multiples, et dans ce corps, cela hurle à la haine, à la peur, à la séparation, au manque, à la mort. Chaque fois que quelqu’un nous marche sur le pied ou que la vie nous prive, en apparence, de quelque chose, notre corps dit « non, rends-moi ce que tu m’as pris! » Mais en réalité, ce corps ne fait simplement qu’hurler l’absence d’amour, de foi et de joie dont il est l’objet depuis des temps immémoriaux.
Quel intérêt y a-t-il à se déclarer « éveillé », « grand éveillé » ou « réalisé » quand la plupart des cellules de son corps sursautent pour un bruit perçu dans la nuit, craint le froid, la faim, le manque ou la douleur? Si notre corps, véhicule de notre âme, n’est pas pleinement informé de notre « réalisation » ou de notre « éveil », s’il est privé de l’infini que nous sommes, alors cet état de conscience prétendument atteint n’est qu’une perception mentale liée à une expérience psychique ponctuelle. Celle-ci est certes agréable et enthousiasmante, mais elle n’est que le simple commencement d’un voyage que beaucoup déclarent achevé avant même de l’avoir réellement débuté…
Cela signifie que dans le processus de retour à soi-même, à sa propre vérité, à chaque seconde, on doit entrer en acceptation de tout ce qui émane de ce corps et qui raconte une histoire opposée à celle de l’Amour doux et fluide. Si nous voulons bien regarder à l’intérieur de nous, si nous voulons bien que notre conscience, ce faisceau lumineux, se dirige vers l’ombre intérieure qui ignore encore qu’elle est l’Amour, alors là, oui, il peut advenir ce moment alchimique de l’incarnation réelle de l’Amour que nous sommes. Mais tant que cela reste un mouvement intellectuel qui nie nos propres réactions de manque d’amour, nous créons encore plus de division.
LA BARRIÈRE ENTRE MOI ET L’AUTRE ENTRE MOI ET MA VÉRITÉ
J’ai beaucoup écrit sur l’égo spirituel dans le Feu de l’esprit. C’est lui qui crée la barrière entre soi et l’autre, entre soi et sa vérité. C’est l’égo spirituel qui se juge quand il se voit incapable de manifester l’amour divin, amplifiant chaque fois ainsi la division intérieure chaque fois qu’il n’est pas à la hauteur de ses propres attentes.
Il crée la séparation, sanctionne, crée de nouvelles règles : « Maintenant que tu es spirituel, ton manque d’amour je ne veux plus le voir! Maintenant que tu es éveillé, réalisé, plus question de manifester la moindre trace de peur, de colère et de tristesse! ». L’être humain occulte et compresse ce volet de son humanité jusqu’au jour où cela explose, le laissant dans une dépression profonde avec l’impression qu’il n’y arrivera jamais.
Cela demande beaucoup d’humilité de reconnaitre en soi cet égo spirituel dans un monde où les sollicitations extérieures sont permanentes. Et si on a constamment la tentation de projeter à l’extérieur la cause de son inconfort, alors on peut essayer : « S’il vous plaît, non merci, tu es mon partenaire. » Le décor extérieur est le meilleur allié pour identifier tout ce qui en soi croit encore faussement à autre chose que l’Amour lui-même. Alors chaque fois que l’on sent monter en soi cette contraction, cette densité, on peut dire « Oui à ce qui est là », un oui permanent qui s’ouvre de plus en plus jusqu’à ce que l’Amour aille illuminer l’intimité sombre du tréfonds de chaque cellule de notre matière corporelle.
C’est difficile de ne pas se juger quand on manque d’amour pour soi ou pour les autres.
Eh bien, c’est déjà une bonne nouvelle que d’être conscient de cela. Ça signifie que nous avons identifié en nous une partie en manque d’amour, qui souffre d’être éloignée de l’Amour lui-même!
Plusieurs ont de la difficulté à trouver leur propre voie, leur vérité intérieure. Comment fait-on pour revenir en soi et être à l’écoute de notre vérité intérieure?
Cela nous ramène toujours à notre besoin de ce temps de silence dont nous avons parlé. Beaucoup de personnes se retrouvent dans une forme de frénésie d’activités humaines, sociales, professionnelles, sentimentales… Mais vient un moment où un examen de conscience s’impose de lui-même pour nous permettre de réaliser que ce que nous vivons actuellement n’est pas complètement aligné sur ce que nous ressentons au fond de nous.
Mais souvent, la tête prend le relais : « Ok! Alors que fait-on maintenant? » C’est là qu’il faut accepter ce temps de latence, de silence, de gestation de soi-même, de convalescence même, et reconnaitre cette force en soi. C’est comme un gros paquebot lancé à pleine vitesse qui ne peut pas s’arrêter instantanément. Avant de savoir quelle nouvelle direction il pourra prendre, avant de pouvoir décider d’un nouveau cap, il lui faut accepter de patienter le temps que l’inertie, c’est-à-dire la force de l’habitude, s’amoindrisse.
JE NE SAIS PAS…
On ne peut sentir cette nouvelle direction que lorsque le paquebot s’arrête totalement, lorsqu’il cesse d’être poussé par le mouvement habituel. Ainsi, il faut accepter de vivre une période d’incertitude sur la suite des choses. C’est comme si, tenant la porte de notre prison intérieure, on se disait prêt à la lâcher seulement un fois renseigné sur l’état du monde au dehors. Eh bien non, ce qu’il y a derrière la nouvelle porte n’est montré que lorsqu’est lâchée l’ancienne! Il est ainsi nécessaire de s’octroyer ce temps de pause, de respiration et, surtout, d’acceptation de ne pas savoir de quoi sera constitué la suite. C’est une oeuvre de foi et de confiance.
Après avoir tenté de tout planifier depuis tant d’années, là, il s’agit de se dire « je ne sais pas ». Je ne sais pas ce qui, en définitive, correspond à la version divine de qui je suis. Ainsi, on cesse de confier à l’intellect les clés de son existence pour les rendre à son cœur, à son inspiration. Mais il va maintenant être question de descendre dans les profondeurs de son être. Y aller et y accepter sans sourciller de recevoir les ruades infernales du doute et de l’incertitude, jusqu’à ce qu’elles s’épuisent totalement.
Évidemment, vont remonter à la surface la peur de manquer, la peur du jugement des autres, de ce que nous allons répondre à ceux qui vont nous demander ce qui nous arrive. Alors on observe, on accepte, car si on veut à la fois continuer de contrôler tout ce qui mijote en soi et tout ce qui bouge autour de soi, si on veut continuer de faire bonne figure, de répondre aux autres, d’être dans les efforts perpétuels pour bien s’adapter à toutes leurs demandes comme si de rien n’était et, en même temps, tenter de voir où l’on va, la manoeuvre sera une fois de plus stérile.
J’AI PEUR, DONC J’Y VAIS…
Beaucoup cherchent à être rassurés dans cet état d’incertitude. Mais si on les rassure, ce serait comme rendre leur peur réelle et lui donner du pouvoir. Tout ce temps de latence sert à faire monter en soi le redouté contenu de cet espace de doute, d’incertitude et d’ignorance. Il n’y a pas d’autre voie que celle de l’expérience individuelle. Nul autre que soi ne peut l’accomplir à notre place.
Ce n’est pas lorsque nous n’aurons plus peur que nous pourrons nous lancer, car ça n’arrivera jamais. La peur disparait lorsque l’action produite malgré la sensation de peur est accomplie. La peur est inscrite dans notre véhicule corporel parce qu’elle a été nourrie depuis la nuit des temps, depuis la première sortie de la grotte où il fallait tout surveiller pour survivre. Le corps, plutôt que d’être commandé par la conscience pure, l’est par le mental qui est pétri de peurs. Il s’agit donc de désapprendre patiemment au corps la dictature de la peur et oser mettre en pratique « j’ai peur, donc j’y vais ».
On sent la peur, elle n’est pas niée, on l’accepte, et on va dans la direction qui semble attiser cette peur pour se donner la preuve que le pas accompli, plutôt que de conduire à la mort ou au précipice, fait grandir la Joie en soi.
Si on ne s’offre pas ce mouvement et, qu’à l’inverse, on attend que le monde autour de soi soit moins effrayant, ou qu’il y ait un signe rassurant qui advienne, cela ne viendra jamais. Tout part de soi, du centre, de l’acceptation en soi de sentir totalement ce doute primitif et cette peur du vide, tout en osant se dire « J’y vais! ». Cela demande du courage - au sens du cœur en action - un courage qui initie ce premier pas vers la liberté, même si la tête et le cœur s’opposent l’un l’autre. Même si la tête dit « N’y va pas! », le cœur affirme « Tremble, mais avance. Avance vers ta vérité… »
Merci du fond du cœur Gregory pour tout.
PORTRAIT
Gregory Mutombo porte depuis l’enfance une spiritualité qui, parce qu’elle préfigure son besoin impérieux d’unité et d’absolu, le singularise. Animé par la volonté de voir derrière les voiles, il se plonge très tôt dans une quête de la Connaissance. Celle-ci passe, au tout début de son adolescence, par une exploration vibrante de ce que l’on nommait alors la parapsychologie. À partir de 1993, à l’âge de 19 ans, il suit différents enseignements à Paris, Nice et Londres. Étant musicien, il s’initie parallèlement à la musicothérapie et à diverses techniques psychomusicales.
En 1995, à l’âge de 21 ans, il part pour un périple pédestre dans les montagnes bulgares, autour des sept lacs de Rila. Il se retrouve face à lui-même dans cette nature essentielle qui lui parle sans discontinuer, de jour comme de nuit. Quelques semaines plus tard, en réponse à une sorte d’injonction intérieure qui s’est imposée à lui au cours d’une longue méditation nocturne, il s’engage dans l’armée, concevant rapidement que ce chemin, par son intensité, sa diversité, sa densité et ses exigences sera riche en initiations.
Il y oeuvrera pendant 17 ans. En octobre 2016, il publie La Symphonie des Âmes – Du fracas des combats à la paix intérieure. En 2018, il nous offre un ouvrage exceptionnel : Le Feu de l’esprit, l’ultime effort est de n’en faire aucun.
Au travers de retraites, voyages, conférences, séminaires et consultations individuelles, ce sont aujourd’hui des dizaines de milliers de personnes qui ont vu, entendu et senti Gregory se pencher sur leur âme pour y lire entre les lignes, pour les aider à y déraciner leurs peurs et leurs peines, pour se reconnecter à eux-mêmes et enfin honorer leur propre vérité. Bref, Gregory Mutombo, c’est la sagesse et l’amour incarnés.
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